Grande figure de l’abstraction et un des pionniers de l’art abstrait reconnu comme le « père du tachisme ». À l’origine de l’abstraction gestuelle, l’œuvre d’Hartung ne sera véritablement connu qu’après 1945.
Né dans une famille de médecins, musiciens amateurs dont il hérite une sensibilité musicale particulièrement développée qui le faisait passer du baroque à la musique dodécaphonique, comme un écho permanent à sa peinture.
Sa vocation précoce sera placée sous la manifestation de l’instinct, de la fulgurance et du signe. Les éléments naturels présideront à l’élaboration du vocabulaire plastique de son œuvre futur dont les racines plongent dans le sentiment particulièrement vif en lui d’une nature intériorisée. Plus tard il confiera : « Peindre a donc toujours supposé pour moi l’existence de la réalité, cette réalité qui est résistance, élan, rythme, poussée, mais qui n’existe pour moi qu’autant que je la saisis, que je la cerne, que je l’immobilise pour un instant que je voudrais voir durer toujours » (in Autoportrait, par Monique Lefèbvre, Grasset, 1976). Tout commence avec la conjuration de sa peur face à l’orage. Un éclair, la foudre, l’orage se déchaîne, il a six ans, il raconte : « Sur un de mes cahiers d’écolier, j’attrapais au vol les éclairs dès qu’ils apparaissaient. Il fallait que j’aie achevé de tracer leur zigzag sur la page avant que n’éclate le tonnerre. Ainsi je conjurais la foudre. Rien ne pouvait m’arriver si mon trait suivait la vitesse de l’éclair. Ils [les éclairs] m’ont donné le sens de la vitesse du trait, l’envie de saisir, par le crayon ou le pinceau, l’instantané, ils m’ont fait connaître l’urgence de la spontanéité » (op. cit.
“ Peindre a donc toujours supposé pour moi l’existence de la réalité, cette réalité qui est résistance, élan, rythme, poussée, mais qui n’existe pour moi qu’autant que je la saisis, que je la cerne, que je l’immobilise pour un instant que je voudrais voir durer toujours. ”
La passion du dessin ne le quittera plus. Dans les collèges de la noblesse et de la haute bourgeoisie qu’il fréquente à Bâle, à Leipzig, puis au lycée de Dresde (1921-1924, baccalauréat latin-grec), ses maîtres le surprennent : « Vous faites encore vos horribles taches d’encre pour former le sujet… De dessin en dessin, j’en étais arrivé à ne plus rien figurer » (op. cit.). Il fait les portraits entièrement abstraits de ses camarades qui se reconnaissent à partir des traits et des rythmes. Parallèlement, l’astronomie et la photographie le passionnent, anticipant sur ses futures préoccupations plastiques. Il fabrique son propre télescope couplé d’un appareil photographique. Ce qu’il observe, ce sont des fragments du réel malgré leur apparence abstraite. De même la photographie, à laquelle il ne cessera de se consacrer toute sa vie, lui permet de capter l’éphémère, des portions de la réalité visible à l’œil (la première exposition d’importance des photographies d’Hartung s’est tenue au Centre Noroit à Arras en 1976). Aussi très attiré par la nature et la religion, il songe à devenir pasteur. L’art est plus fort. Il s’enthousiasme pour Rembrandt qui le touche profondément. « Dans les drapés de la robe de la mère (La Famille ) je découvris que Rembrandt faisait aussi des taches. Des taches qui existent par elles-mêmes, par leur rythme, leurs couleurs, leur expressivité. Après, je sus que je serais peintre » (op. cit.).
Il étudie aussi Goya, Hals, le Greco et en 1921 et 1922 les expressionnistes allemands comme Nolde et Kokoschka qui déforment l’apparence au profit de l’expression. Progressivement l’image s’efface pour révéler un jeu de taches et de tensions. Déjà le sujet compte peu. Ignorant tout de ses grands aînés (Picasso, Braque, les Delaunay, Kandinsky et Klee dont on ne peut voir les œuvres), ses premières aquarelles abstraites de 1922 ne peuvent être comparées à rien d’autre : avec une absolue spontanéité le jeune homme s’émerveille devant le langage symbolique de son trait, de ses encres et couleurs. Par la suite, il restera fidèle à l’emploi de la couleur structurée et utilisée comme facteur de dynamisme. (Ces aquarelles seront réunies sous forme de reproductions dans un album publié en 1966 préfacé par Will Grohmann.) Elles sont suivies en 1923-1924 d’une série de fusains et sanguines où déjà la vitesse d’exécution est le facteur déterminant.
1924-1925, études de philosophie et d’histoire de l’art, et aux Beaux-Arts de Leipzig. En 1925, il assiste à une conférence de Kandinsky qu’il rencontre et découvre une autre forme d’abstraction, mais juge avec lucidité ses recherches, à l’opposé du géométrisme, aussi novatrices. Il tourne le dos au Bauhaus, refuse l’avant-garde de Mondrian, lui préférant les Beaux-Arts de Dresde (1925-1926) et de Munich (1928) où il continue d’étudier la tradition classique et les techniques (seules œuvres figuratives, détruites lors d’un bombardement). 1926, nouveau choc avec la découverte de la peinture moderne hors d’Allemagne, à l’Exposition internationale de Dresde : l’impressionnisme, le fauvisme, le cubisme qu’il connaît mal. Il s’intéresse surtout à Matisse, Braque, Picasso, Rouault. Fait toujours beaucoup de copies d’après les maîtres dans les musées et sur reproductions. En été, parcourt l’Italie à bicyclette. Il décide d’aller à Paris où il arrive en octobre 1926. Il y restera jusqu’en 1931. Séjour entrecoupé de quelques voyages (au Barcarès près de Perpignan en 1927, aux Pays-Bas et en Belgique). Étudie Cézanne, Van Gogh, puis le cubisme qui l’influencera jusqu’en 1932. Il se penche sur les rapports de l’esthétique et des mathématiques (distances, proportions, rythmes). Délaisse les académies libres pour visiter les musées, les expositions. Très seul, il n’a aucun contact avec les autres peintres. La rencontre d’une jeune Norvégienne, Anna-Eva Bergman, le sort de son isolement. Il l’épouse cinq mois après en septembre 1929.
Hartung expose ses œuvres pour la première fois en novembre 1931, galerie Kühl à Dresde, puis l’année suivante avec sa femme galerie Blomqvist à Oslo. Le couple vit dans une île au sud de la Norvège. 1932, la disparition de son père l’affecte cruellement et face au nazisme grandissant il quitte l’Allemagne pour se réfugier aux îles Baléares. En passant par Paris, il confie quelques œuvres à Jeanne Bucher. Il se construit une petite maison près de Fornells, port de pêcheurs à Minorque où lui et sa femme travaillent, vivant de pêche (1933-1934). Il est en pleine possession de ses moyens.
Délaissant le cubisme, il revient à ses essais de jeunesse, tout en spontanéité. Aucun titre pour ses œuvres hormis la date afin de les situer chronologiquement, précédée de la lettre T, plus rarement G. Ses avoirs bloqués en Allemagne, il part pour Berlin afin de s’occuper de sa situation matérielle. Le combat déjà entrepris, il le poursuit, le poussant chaque fois dans ses ultimes limites. L’homme et l’œuvre s’identifient dans cette quête d’absolu. Refusant d’obtempérer à un art de propagande politique sous la pression de la montée du nazisme et afin d’échapper à sa police, il fuit Berlin avec l’aide de Will Grohmann et de Christian Zervos pour se fixer définitivement à Paris en 1935. Il installe son atelier 19, rue Daguerre. Se lie avec Jean Hélion et Henri Goetz, rencontre Mondrian, Kandinsky, Magnelli, Domela, Miró, Calder, avec lesquels il expose galerie Pierre. Jusqu’à la guerre, il participera aux Surindépendants. Les séries peintes entre 1934 et 1938 sont appelées Taches d’encre. Toutes les caractéristiques de son graphisme sont déjà en place : contrastes masse-ligne, taches-hachures, soutenues par une maîtrise technique où l’improvisation demeure « en liberté surveillée ». C’est ce style déconcertant et inédit dans le mouvement abstrait, d’une totale liberté, qui le rendra célèbre bien après la guerre. De grosses difficultés financières le contraignent à prendre un atelier plus petit 8, rue F. Mouthon. Période difficile, dessine sur des papiers de bistrot, sa femme tombe gravement malade. Ils divorcent, Anna-Eva rentre en Norvège. Hébergé pendant un an par H. Goetz, il travaille dans l’atelier de son ami le sculpteur González et se met à la sculpture.
Créateur à la stature exceptionnelle, Hartung n’a jamais dévié de ses engagements. Politique : poursuivant sa lutte contre le nazisme, il s’inscrit sur la liste des volontaires contre l’hitlérisme et fin 1939 s’engage dans la Légion étrangère. En juillet il a épousé Roberta González et à la démobilisation vit dans le Lot avec la famille du sculpteur qui meurt en mars 1942. Avec l’occupation de la zone libre, Hartung fuit en Espagne, aidé par Picasso, puis est incarcéré dans les prisons franquistes, avant de rejoindre une nouvelle fois la Légion. C’est lors de l’attaque de Belfort que, gravement blessé, il doit être amputé d’une jambe. Amoureux : en 1952 les deux époux se retrouvent. Le musée d’Art moderne de Paris présente une rétrospective de Julio González. « Le dernier jour il y avait foule. Soudain je reconnus une silhouette familière. J’en restai cloué sur place. Le cœur battant, Anna-Eva et moi avons avancé l’un vers l’autre » (op. cit.). Forte prégnance du destin… Hartung reste convaincu qu’« une œuvre d’art est une manifestation parallèle de la vie de l’artiste, l’extériorisation des forces qui sont en lui, de tout ce qui entre en jeu pour le pousser à l’action, de tout ce qui met en jeu ses impulsions, ses tendances, ses expériences » (op. cit.). Roberta González s’efface et Hartung s’installe avec Anna-Eva Bergman dans leur atelier rue Cels.
De retour à Paris fin 1945, il recommence à peindre et est naturalisé français. Ce préambule sur la période précédant celle étudiée dans ce livre trouve sa justification dans la continuité d’une œuvre déjà aboutie et dont Hartung a poursuivi le langage novateur, qui paradoxalement sera occulté par la génération abstraite d’après-guerre. De même, et de par son isolement volontaire, « l’œuvre d’Hartung n’a pratiquement aucune répercussion entre 1921 et 1945 » (in Mathieu, De la révolte à la renaissance, Gallimard, 1973).
Malgré une présentation de ses œuvres — la première dans la capitale — en 1939 galerie Henriette en compagnie de Roberta González, c’est un inconnu que découvrent les amateurs au premier Salon des réalités nouvelles en 1946, Salon où il exposera peu, lui préférant le Salon de mai auquel il sera fidèle dès cette période. Il entre en contact avec Poliakoff, Schneider, Marie Raymond, Domela, et avec eux expose dans un local de la rue Cujas. Cela suffit à des critiques avertis pour le remarquer, comme Charles Estienne, Wilhelm Uhde, Léon Degand et Madeleine Rousseau, qui dès 1949 publiera à Stuttgart le premier livre consacré au peintre, avec des préfaces de James Johnson Sweeney et Ottomar Domnick.
C’est d’ailleurs Madeleine Rousseau qui préface la première exposition personnelle de Hartung à Paris, en 1947, dans une petite galerie du nom de sa propriétaire, Lydia Conti, et qui ouvre à cette occasion au numéro 1 de la rue d’Argenson. Treize toiles sont présentées, datées entre 1935 et 1947. Ch. Estienne remarque l’intensité tragique de l’ensemble. Jusqu’en 1957 ses œuvres présenteront un caractère révolté. Dès 1945 les taches de formes grises apparaissent et en 1947-1948 le trait solide en « clayonnage » amorce une nouvelle orientation. Il faut noter dès à présent que jusqu’à la fin des années 1950, Hartung pratiquera simultanément dessins et toiles. Plus précisément esquisses, pastels, dessins précèdent la toile. Mais lorsqu’il aborde celle-ci, l’élégance du trait est la même. S’il ne nous est pas interdit d’y voir une similitude avec un idéogramme, dont il ne partage pas le caractère décoratif, le peintre, contrairement à certains de ses confrères, s’est toujours défendu d’avoir subi la moindre influence de la calligraphie orientale : son trait est plus appuyé.
Deuxième exposition chez Lydia Conti en 1948 avec des dessins datés de 1922 à 1948. Alain Resnais, qui a réalisé un film sur l’artiste, le présente en Allemagne et galerie La Hune à Paris en 1950.
Parallèlement les expositions de groupe vont révéler cette peinture totalement nouvelle. Années héroïques pour l’art abstrait dont les protagonistes sont accueillis par de récentes galeries. En décembre 1947 s’ouvre l’exposition organisée par Georges Mathieu à la galerie du Luxembourg, 15, rue Gay-Lussac, ouverte il y a un an par Eva Philippe qui la dirige. Sous le titre « L’Imaginaire », la peintre a réuni Hartung, Atlan, Wols, Bryen, auxquels s’adjoindront Arp, Riopelle, Ubac, Vulliamy, Brauner, Solier, accompagnés d’un texte de Jean-José Marchand. Elle est suivie en avril 1948 par celle organisée toujours par Mathieu, galerie Colette Allendy, au titre énigmatique HWPSMTB qui sont les initiales des noms de chacun des participants : Hartung, Wols, Picabia, Stahly, Mathieu, Tapié et Bryen. Un catalogue prolonge l’exposition avec des textes de chacun des protagonistes, sauf Hartung et Stahly. Jean-José Marchand écrit : « L’humour et la tragédie se rejoignent ici pour redonner force (en apparence) à de vieilles doctrines et pour aboutir (en fait) à un art complètement nouveau, qui constitue à ce jour l’apport original de notre après-guerre » (in Paru, juin 1948).
Hartung figurera encore chez Colette Allendy dans des expositions collectives en 1949 et 1950, pour « D’une saison l’autre » préfacée par Charles Estienne où il est entouré de Schneider, Soulages et les débutants Doucet et Gauthier.
En juillet 1948 a lieu une autre exposition dans une nouvelle galerie dirigée par Florence Bank, galerie des Deux-Isles. Mathieu réunit avec lui Hartung, Wols, Tapié, Picabia, Ubac, Arp et Germain avec des dessins, gravures et lithographies noir et blanc sous le titre « White and Black ». Préfaces d’Édouard Jaguer qui écrit : « Pour tous ceux qui sont ici réunis, il y va de la conquête d’un lieu subconscient, mais réel » et remarque « un phénomène nouveau dont le passage météorique illumine aussi l’écriture », et de Michel Tapié. Puis en novembre, galerie du Montparnasse ancienne librairie transformée en lieu d’exposition et dirigée par Gilberte Sollacaro, a lieu la première confrontation avec la peinture américaine : Bryen, Hartung, Mathieu, Picabia, Wols côtoient de Kooning, Gorky, Pollock, Renhardt, Rothko, Russel, Sauer et Tobey. Enfin en 1957, chez Nina Dausset, qui a ouvert sa galerie deux ans plus tôt rue du Dragon. Mathieu regroupe avec lui sous le titre « Véhémences confrontées » des artistes internationaux : Bryen, Capogrossi, de Kooning, Hartung, Riopelle, Russel, Wols avec un texte de Tapié. La même année il participe à l’exposition « Advancing French Art » à New York, Chicago, Baltimore et San Francisco. Il y a également des expositions de groupe organisées par Denise René qui a ouvert en 1944 sa galerie au 124, rue La Boétie. Hartung y figure dès 1946 aux côtés de Schneider, Deyrolle, Dewasne, Marie Raymond (texte de R. de Solier). Puis en 1947 et 1948, « Tendances de l’art abstrait », 1949 « Quelques aspects de la peinture présente ». Citons aussi ses participations en 1952 à « Un art autre » galerie Facchetti qui reprend le titre de l’ouvrage de Michel Tapié à l’occasion de sa parution, et à l’exposition organisée par Ch. Estienne dans le hall du Théâtre de Babylone « Peintres de la Nouvelle École de Paris », en 1954 au groupe « Divergences » organisé par R. V. Gindertaël, galerie Arnaud, et à celui « Individualités d’aujourd’hui » galerie Rive Droite. Dès 1954 il est invité à « L’École de Paris », galerie Charpentier, jusqu’en 1958.
Ces manifestations sont importantes car elles permettent aux critiques et au public de suivre la démarche d’Hartung, d’autant que les expositions particulières de l’artiste sont peu fréquentes pour les œuvres récentes.
La première a lieu en novembre 1956 galerie de France et suscite un immense intérêt. Un contrat passé avec Gildo Caputo, le directeur, le fait exposer des pastels en 1958,en 1961 des peintures de 1922 à 1939 (catalogue), en 1962 des œuvres récentes (catalogue), en 1964 quinze peintures 1963-1964.
Expositions suivies par celles de toiles récentes en 1966, 1969, 1971, 1972, 1974, 1979. En 1977, la galerie présente vingt-cinq œuvres de 1922 à 1952.
À partir de 1985, il expose galerie Daniel Gervis.
Parallèlement, la province et l’étranger multiplient les manifestations en galeries et dans les musées.
Parmi les plus importantes : 1957, exposition rétrospective itinérante en Allemagne. 1959, rétrospective au musée d’Antibes (première exposition dans un musée français). 1960, Biennale de Venise, se voit attribuer le grand prix international de Peinture : une salle du pavillon français est consacrée à son œuvre. 1963-1964, exposition rétrospective itinérante à Zurich, Vienne, Düsseldorf, Bruxelles, Amsterdam. Pour la liste complète des manifestations, se reporter au catalogue édité par la galerie Marwan Hoss, Paris, à l’occasion de la présentation des œuvres ultimes d’Hartung (Fiac, 1990).
Invité à la première « Documenta » à Kassel en 1955.
Sur le plan de l’écriture, de 1952 à 1954 le langage d’Hartung se modifie. Ayant délaissé le tachisme de la période 1934-1938, le trait supplante la couleur — contrepoint de la ligne sur le fond, avec l’adjonction de la tache-forme produisant ce dynamisme spatial si personnel — avant l’apparition de formes plus complexes où dominent les courbes, les croissants, les faisceaux de barres noires épaisses sous l’effet de coups de pinceau souples et rapides sur fond neutre, unique contrepoint. Le dynamisme gestuel semble s’apaiser face à une composition plus réfléchie. Et puis sans renoncer à ce qui caractérise son œuvre, à savoir l’antagonisme entre les formes-signes et les fonds unis, le rythme des lignes s’intensifie jusqu’à suggérer des « touffes », des « gerbes » (1955 à 1959). Les traits présentent des tensions et des épaisseurs différentes. Ce qui ne sera pas sans influencer son œuvre graphique aussi essentiel à ses yeux de créateur.
Ainsi fait-il une première exposition de son œuvre gravé en 1954 galerie La Hune, qui présente en 1958 les lithographies.
En 1956 la galerie Craven montre des dessins datés de 1921 à 1938.
1955, invité à la Biennale de gravure à Ljubljana où il exposera à plusieurs reprises. (prix d’honneur en 1967 à la VIIe Biennale). Jusqu’en 1965 on répertorie trois séries de gravures : 1946-1947, hiver 1952-1953, alors qu’il participe pour la première fois à la Biennale de Venise avec des toiles, 1957, gravures et lithographies,. Il commence une série de pastels poursuivie jusqu’en 1961. Peint peu entre 1959 et 1960. 1963, nouvelle série de lithographies réalisées à Saint-Gall. 1964, « Hartung-Bergman », exposition itinérante, gravures et lithographies en Israël. 1965, à l’occasion de la parution du catalogue raisonné de l’œuvre gravé (1921-1965) édité par la galerie Rolf Schmücking à Braunschweig, exposition de la totalité de l’œuvre gravé de Hartung au musée de la ville.
Réédition Bâle 1990.
À partir de 1961, nouvelle technique ouvrant une période caractérisée par des grattages dans la peinture encore fraîche laissant apparaître les fonds de la toile. Apparitions d’entrelacs, d’ondulations très fines dont les enchevêtrements donnent l’illusion de grilles, sortes de griffures, de zébrures. Progressivement les lignes disparaissent pour laisser place à des masses sombres — sorte de fumée menaçante — sans graphisme, dont les nuances se superposent à un fond plus clair, sur des toiles de vastes dimensions.
Œuvre dépouillé de toute référence au monde extérieur comme de toute expression reflétant un quelconque état d’âme, « nous entrons, nous dit Hartung, dans l’inconnu, dans la zone du pas-encore-créé… Les mouvements intérieurs peuvent être une base, uniquement une incitation ». En 1969, les couleurs réapparaissent avec une prédilection pour les jaune citron, les bleus intenses, les rouge brique, les vert clair et le noir, toujours permanents, traduisant une inspiration poétique qui domine le geste.
En 1972, il s’installe avec A.-E. Bergman sur les hauteurs d’Antibes dans une vaste villa-atelier, conforme à leurs besoins, comme il avait déjà fait réaliser en 1959 un nouvel atelier suivant ses plans dans le quartier du parc Montsouris. Sa femme s’y éteindra en 1987 et lui le 14 décembre 1989.
L’Action Painting puise ses origines dans l’œuvre d’Hartung qui s’était rendu une première fois aux États-Unis en 1964, mais où ses œuvres étaient présentées dès 1957.
De multiples rétrospectives se succèdent à partir de 1965 avec catalogues.
1966, Museo Civico di Torino.
1969, musée national d’Art moderne de Paris, présenté ensuite à Houston, musée du Québec, Montréal.
1974, Wallraf Richartz Museum de Cologne.
1975, National Galerie, Berlin, et Städtische Galerie, Munich.
1977-1981, exposition itinérante de lithographies et gravures par le Centre G. Pompidou.
1980, musée d’Art moderne de la Ville de Paris : œuvres de 1922 à 1939, texte André Berne-Joffroy. Musée de la Poste, Paris : tapisseries et gravures sur bois de Hartung et de sa femme.
1981, Städtische Kunsthalle, Düsseldorf, et Staatsgalerie Moderner Kunst, Munich. Fondation Henie-Onstad, Norvège.
1986, musée d’Évreux. Texte Pierre Daix. Biographie et bibliographie.
1987, « Premières peintures 1922-1949 ». Musée Picasso, Antibes.
1991-1992, « Hartung œuvres extrêmes 1922-1989 ». Musées de Montbéliard et de Ludwigsburg. Catalogue.
2019-2020, Hans Hartung La fabrique du geste. Musée d’art moderne de la Ville de Paris. Catalogue.
Couvert d’honneurs et reconnu internationalement : 1970, grand prix des Arts de la Ville de Paris, 1977, membre de l’Institut, Académie des beaux-arts, Paris. Entre autres distinctions, il a continué son œuvre loin du tumulte intrigant de la capitale. Universel, ne faisant jamais référence à la nature mais puisant en lui cette énergie, son œuvre né d’une profonde ascèse va au-delà du visible pour nous livrer un message d’une haute sensibilité dans une économie de matière qui fait écho à celle de son geste, précis. Son influence sur la jeune génération a été déterminante.
De très nombreux musées conservent ses œuvres. En Allemagne citons en dehors de Berlin, Bonn, Cologne, Hambourg parmi d’autres, les salles Hartung à Darmstadt (1984) et Munich (1982), en Angleterre, en Australie, en Autriche, au Brésil, aux États-Unis, en Israël, en Italie, au Japon, au Kenya, en Norvège, aux Pays-Bas, en Suède, en Suisse, en Yougoslavie, et en France : musée d’Art moderne, Centre G. Pompidou et Ville de Paris, Aix-en-Provence, Antibes, Chalon-sur-Saône, Dunkerque, Grenoble, Lille, Lyon, Marseille, Nantes, Rouen, Fondation Maeght Saint-Paul, Saint-Paul-de-Vence, Strasbourg, Toulouse.
Extrait de « L’Ecole de Paris, 1945-1965 Dictionnaire des peintres »,
éditions Ides et Calendes, avec l’aimable autorisation de Lydia Harambourg
www.idesetcalendes.com